Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
3 janvier 2012 2 03 /01 /janvier /2012 15:49

 

Par Tarick Dali à 16:02

Premier ministre de Turquie depuis 2003, reconduit en 2011 pour un troisième mandat de quatre ans, Recep Erdogan va être, enfin, reconnu pour ce qu’il est : un islamiste et non le "démocrate musulman" qu’il prétend être. Démocrate musulman est un oxymore, comme l’a très bien dit notre Secrétaire d’État à la Jeunesse, Jeannette Bougrab. Voilà au moins une retombée positive du vote de la proposition de loi déposée par Valérie Boyer. Loi qu’il faudra tout de même jeter aux oubliettes en même temps qu’il faudra abroger les lois mémorielles (cf. http://www.ladroitelibre.fr/authors/20-Tarick-Dali/P2.html) qui prétendent dicter une histoire officielle, telle la scélérate loi Gayssot et la malhonnête loi Taubira. Évidemment, pas avant d’avoir démontré à Erdogan qu’il était hors de question de céder à ses diktats.


La loi Boyer est la pire réponse à une bonne question : la Turquie nie la réalité historique du génocide arménien et promet trois ans de prison à quiconque en parlerait pour délit d’insulte à l’identité nationale. La proposition de Valérie Boyer est donc l’exacte symétrie de la législation turque. En pire puisque la France qui n’a rien à voir là-dedans, envisage de punir ses propres ressortissants : imaginons qu’un journaliste français, en reportage en Asie mineure, réalise une interview d’un ministre turc en lui demandant s’il reconnaît le génocide arménien. La réponse sera évidemment « non », ne serait-ce que parce que s’il dit « oui », le ministre tombera lui-même sous le coup de la loi turque. Mais il ne tombera pas sous le coup de la loi Boyer puisqu’il aura tenu son propos tranquillement chez lui en Anatolie. En revanche, le journal qui aura publié cette réponse sera poursuivi, puisqu’en droit français, le directeur d’une publication est responsable des informations qu’elle diffuse.

Outre son absurdité, ce texte, comme toutes les lois mémorielles, est une double atteinte à la liberté d’expression et au travail des historiens, donc à la démocratie. C’est exactement ce que fait la Turquie en interdisant tout débat sur le génocide arménien. En ce sens, le texte voté la semaine dernière légitime les textes turcs et le déficit démocratique de ce pays.
Ce n’est certes pas ce que souhaitait Valérie Boyer. Mais si elle a cru devoir déposer ce texte liberticide, c’est, comme le dit de façon remarquable Alexandre Del Valle (http://www.francesoir.fr/actualite/international/propos-crise-franco-turque-et-loi-sur-genocide-armenien%E2%80%A6-168413.html) dans France Soir, parce que « les Arméniens ou leurs descendants et sympathisants ne peuvent plus organiser d’événements commémoratifs du génocide sans être menacés, harcelés, agressés par des nationalistes turcs ».

Les menaces que le député des Bouches-du-Rhône subit depuis le vote de la loi, sont désormais connues des Français parce qu’elles visent un parlementaire. Mais elles ne sont qu’un épisode de ce que subissent quotidiennement, et en silence, ceux qui osent rappeler l’histoire. Ces comportements qui ne donnent d’ailleurs jamais lieu à des poursuites judiciaires, se multiplient depuis l’arrivée au pouvoir à Ankara d’Erdogan et de son parti islamiste AKP. Si des énergumènes agissent de la sorte, ce qui n’était pas le cas du temps de la Turquie kémaliste, c’est parce qu’ils se sentent soutenus par leur patrie.

Erdogan ne cesse de leur donner l’exemple. Huit ans après son arrivée au pouvoir, il est plus que temps de le remettre à sa place par l’interruption immédiate des négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. La question ne devrait même pas se poser puisque le Parlement européen, dans sa résolution du 18 juin 1987, conditionne à la reconnaissance du génocide de 1915-1916, une éventuelle adhésion de la Turquie à l’Europe. Un quart de siècle plus tard, la Turquie persiste à promettre la prison à quiconque se hasarderait à admettre la réalité historique. 

En continuant à discuter avec la Turquie, l’Europe accepte que ce soit aux conditions imposées par Erdogan. Sa dernière lubie en date est d’exiger que Chypre renonce à présider l’Union européenne au second semestre 2012, sans se préoccuper des règles et du calendrier de l'Union européenne à laquelle il postule. Le même Erdogan avait déjà mis son grain de sel, cette fois-ci avec succès, dans l’adhésion de Chypre à l’Union : alors qu’il eût été aisé d’exiger de Chypre qu’elle mît fin au mur de Berlin qui sépare l’île et sa capitale Nicosie, en préalable à son adhésion à l’Union, celle-ci a omis de le faire pour ne pas déplaire à Ankara. Avec pour conséquence, au large de la Syrie, un membre de l’Union européenne et de la zone euro, coupé par une ligne de démarcation comme au peu regretté temps de la guerre froide.

Nul en France aujourd’hui ne prétend qu’il n’y a pas eu de génocide des Arméniens au début du vingtième siècle. En plus d’être stupide, la loi Boyer est donc inutile. Si des ignorants, des imbéciles ou des manipulateurs nient le génocide arménien, il n’est pas du rôle de la loi de les faire taire. Il en va de la survie de la démocratie. La loi Gayssot a ouvert une boîte de Pandore : lorsqu’on pose des limites à la liberté d’expression, on ne sait jamais où elles s’arrêtent. Dès lors qu’il a déjà satisfait à semblable exigence, quelle légitimité peut avoir le Parlement  à s’opposer à une demande de tel ou tel lobby de museler quiconque ?

Liberté pour l’histoire : en vertu de ce principe qui ne doit souffrir aucune exception, les parlementaires ont la possibilité de refuser de se laisser intimider par la Turquie. La France, championne des commémorations, devrait simplifier son calendrier mémoriel. Il serait judicieux, dans le cadre d'une telle réforme, d’instaurer une journée commémorative du génocide arménien, le 24 avril par exemple, en souvenir de la rafle de Constantinople du 24 avril 1915 qui pourrait s’étendre à la commémoration de tous les massacres commis en Asie mineure et, plus généralement, aux persécutions dont ont été et sont toujours victimes les chrétiens d’Orient.

L’inscription de cette mémoire dans les calendriers ouvrira enfin les livres d’histoire au drame arménien, épisode relativement ignoré de la population française, et au sort tragique des chrétiens du monde musulman. La connaissance de l’histoire luttera contre le négationnisme de façon toujours plus efficace et respectable que l’édiction d’une histoire officielle, apanage des dictatures. Une fois ce texte voté, il faudra abroger toutes les lois mémorielles, à commencer par la loi Gayssot.

Erdogan sera encore plus furieux ! et alors ? jusqu’à présent, il n’a jamais démontré être le démocrate qu’il se prétend. Il est toujours celui qui a goûté aux prisons de la défunte Turquie laïque pour avoir, déjà, menacé l’Occident en proférant ces vers : « Les minarets seront nos baïonnettes, les coupoles nos casques, les mosquées seront nos casernes et les croyants nos soldats ».

 

Le Blog de la Droite Libre

Partager cet article
Repost0

commentaires