François PINTE
Monsieur le Président, mes chers collègues,
Puisqu’il semble que ce débat budgétaire soit surtout l’occasion de saluer le départ de celui
qui, après avoir été durant 18 ans dans l’opposition - on ne souhaite cela à personne - a été, pendant 7 ans 1/2 ans, le Rapporteur général du Budget, l’opposition, elle aussi apportera donc sa
contribution au débat, en distinguant comme il se doit, l’homme de l’adversaire politique.
L’homme tout d’abord, pour lui reconnaitre en dehors de cet hémicycle, des qualités humaines
indéniables.
Je peux en témoigner.
En quittant cette assemblée, nous reconnaitrons aussi, que vous avez su mettre, contrairement
à
tant d’autres dans votre parti, vos actes en cohérence avec vos convictions puisque
vous
avez décidé de ne pas attendre l’adoption d’une éventuelle loi contre le cumul des mandats
pour vous l’appliquer
Respect donc.
Voilà pour l’homme.
Quant à l’adversaire politique, l’opposition ne s’associera évidemment pas à l’hommage qui
vous a été rendu par notre président, qui si satisfait de votre travail, vous a pourtant en début de cette nouvelle mandature, nous ne l’oublions pas, adressé une sanction au combien vexatoire,
en ne vous renouvelant pas sa confiance pas pour la 1er vice-présidence de notre assemblée.
Non, l’opposition est moins hypocrite, elle a toujours combattu votre politique budgétaire
considérant que celle-ci n’était pas responsable :
En effet, nous retiendrons que sous votre ère (comparaison des comptes administratifs 2003 et
2010), la dette de la région des Pays de la Loire par habitant a plus que doublée et est passée de 122 € à 262,26 €.
En même temps, les impôts directs par habitant ont cru de 52%, passant de 47,94 € à 72,93
€.
La TIPP a été poussée à son taux maximum, taxe s’il est pourtant, des moins
justes.
Les impôts ont été augmentés de plus de 20% sous le mandat dernier et cette hausse n'a été
stoppée que grâce finalement, aux décisions de gel prises par l'état.
La Région a
même souscrit sous votre autorité, on en a peu parlé, des emprunts toxiques même s’ils ont été corrigés depuis :
- le premier, d’un montant de 18,6M€, souscrit pour 15 ans, prévoit un taux fixe de 3,85%
jusqu’au 1er décembre 2008, mais égal à plus de 2 fois l’inflation pour les 14 années suivantes, plafonné à 5,75%
- le second, d’un montant de 39M€, souscrit également sur 15 ans, fixe un taux à 3,26 %
jusqu’au 7 avril 2010 mais au-delà «ce taux sera majoré d’une marge déterminée, pour une période d’intérêt donnée, comme le niveau maximal observé entre 0 et 2,2 fois la valeur de la différence
constatée entre le Tibeur 12 mois post-fixé et un seuil de 7% augmenté de la marge évolutive de la période d’intérêt précédente, étant précisé que le taux d’intérêt serait fixé à 3,26 % pendant 5
ans à chaque constatation du Tibeur 12 mois en deçà d’un seuil de 4,4 % au titre des échéances postérieures au 7 avril 2010 ».
Vous avez aussi placé notre Région sous le système de notation de Standard
& Poor's.
On aurait pu trouver mieux que cette agence qui vient de commettre deux erreurs successives,
en particulier celle de la dégradation erronée du triple A français, d’ailleurs commenté précipitamment par le très expérimenté François HOLLANDE.
Notons également que notre Région est notée AA, deux crans en dessous de la note
française.
Alors, vous nous avez expliqué avec beaucoup de sureté Monsieur VAUGRENARD, à l’occasion de
la DM2 (Décision Modificative) en octobre dernier, qu'une région ne pouvait pas être notée AAA puisqu'elle ne pouvait plus lever l'impôt.
C’était sans compter sur la Région Rhône-Alpes qui vient de démontrer le contraire
!
Je suis certain que vous aurez l’honnêteté de reconnaître votre erreur dans quelques
instants, que nous aurons à cœur une fois avoué, de pardonner…
L'ingénierie financière que vous vous targuer depuis plusieurs années
Monsieur VAUGRENARD d’avoir mis en place signifie en fait, le plongeon dans cette même finance mondiale que vous condamnez par ailleurs : emprunts auprès de la Royal Bank of
Scotland, puis de celle du Canada, curieux choix de la société BGL, une filiale de la BNP, située au Luxembourg, comme intermédiaire du service financier des
obligations de l’emprunt.
Quel paradoxe, alors même que dans une campagne de communication diligentée
par vous 'CAC 40', la Région vilipendait le système bancaire et la finance internationale et y dénonçait même le Luxembourg comme paradis fiscal !
Lorsque vous étiez dans l’opposition je me souviens que vous nous avez sorti
un jour «lorsque l’on monte aux arbres, il faut avoir le cul propre».
Je vous retourne donc le compliment…
Mais ce que nous vous reprochons peut être le plus, c’est d’avoir sans cesse,
dénoncé le désengagement de l’Etat comme si la région des Pays de la Loire était un «Etat indépendant» renforçant ainsi de façon si archaïque l’esprit de féodalité.
Comme si les ligériens n’étaient pas avant tout des français et que la dette
nationale n’était pas aussi, un peu la leur… comme si l’effort national ne pouvait pas un peu trouver une solidarité en région des Pays de la Loire
Est-il tout à fait anormal, que la Région au regard de la situation de notre
Pays prenne la même posture de responsabilité que celle qui est entreprise par l’Etat.
Face à la crise notre responsabilité commune est de faire mieux avec
moins.
Osons le dire !!
Cela veut dire, qu’il ne suffit pas de revisiter quelques politiques mais que
la mutation copernicienne que nous sommes en train de vivre nous oblige à de vrai choix, à définir de vraies priorités, et je ne parle même plus là, des dépenses indécentes de communication qui
ont souvent comme seule but d’attaquer le gouvernement et qu’il serait plus honnête de faire financer par le Parti Socialiste.
JE ne parle pas non plus de votre indécente proposition, à l’heure où l’on
demande des efforts aux Français, d’augmenter, une nouvelle fois, le nombre de membres de la commission permanente pour satisfaire vos petits arrangements au sein d’une majorité qui, nous le
sentons bien au niveau local comme au niveau national, n’est d’accord sur rien sauf peut-être sur le fait de battre la droite. Quel beau programme d’avenir !
Non, c’est d’une vraie refonte de nos politiques dont nous avons aujourd’hui
besoin.
Et nous vous demandons solennellement de réduire, non pas de 1,6%, mais de 5%
vos dépenses de fonctionnement à l’occasion du budget 2012, et ce, pour assurer les dépenses d’investissement dans une période où il sera en effet sans doute difficile d’emprunter, même si le
Premier ministre a annoncé la mobilisation de 5 Milliards d’€ distribués par la Caisse des Dépôts et le réseau bancaire.
Et c’est d’un vrai partenariat de confiance avec l’Etat et les autres
collectivités qu’il nous faut rétablir.
Les temps particulièrement incertains que nous traversons ne nous autorisent
pas à mener vos petites guerres
Mais, je reviens à vous Monsieur VAUGRENARD.
A votre actif, ou à votre passif plutôt, dans le dénigrement systématique de
l’Etat, la création d’une commission d’évaluation sur les transferts de compétences pour compter, année après année, les petits sous qu’ils manquaient dans votre cagnotte régionale.
Cela avait quelque chose de pitoyable, de médiocre, au regard des personnes
que nous avons accueillis, d’autant que vous saviez pertinemment que la différence entre la somme versée et la somme dépensée dépendrait forcément de la façon dont les transferts de compétences
seraient organisés régionalement.
Même état d’esprit aujourd’hui sur les dotations de l’Etat.
Je me souviens pourtant d’un jour où alors il est vrai, vous étiez encore
dans l’opposition, vous nous ventiez les mérites des Landers Allemands :
«Ils méritent toute notre attention» disiez-vous
«Le fait que la totalité de leur dotation provienne de manière
constitutionnelle de l’état central ne les empêche manifestement pas d’avoir une totale autonomie dans leur fonctionnement et dans leur politique.»
«En réalité concluiez-vous, l’autonomie fiscale n’est pas une fin en
soi».
Je partage tout à fait votre analyse d’alors et vous invite à convenir que
nous ne sommes finalement, pas si moins bien lotis que nos amis allemands.
Un mot enfin pour critiquer votre posture sur la taxe professionnelle : La
réforme de cette taxe, adoptée en 2001 avait pour objectif de réduire la facture fiscale de l’industrie.
Cet objectif a été atteint de 24% à 45% selon un rapport de Nicole BRICQ, le
rapporteur PS du budget au Sénat.
Taxe professionnelle qui pour améliorer la compétitivité française a été
remplacée par la contribution économique des territoires.
Contrairement à la TP qui était assise sur les équipements et les machines,
elle ne pénalise plus l’investissement.
Voilà pourquoi l’industrie qui investit beaucoup est gagnante.
Par ailleurs, le gouvernement a souhaité que la réforme favorise les PME, et
a donc limité leur CVAE. Dans les faits ce sont les entreprises réalisant entre 250.000 et 2 millions de CA qui sont les plus gagnantes/
Leur impôt a été réduit de 65 à 70 % contre 31 % en moyenne.
C’est plus de 2Millions d’entreprises gagnantes dont beaucoup de ligériennes
qui correspondent, vous le savez, à cette taille de structure.
Voilà quelques-uns de vos paradoxes, quelques-unes de vos contradictions,
pour rester courtois jusqu’au bout, qui fait que définitivement nous préférons l’homme à l’extérieur de cet hémicycle à l’adversaire politique.
Bon vent tout de même.